1 juillet 2012

Home run romanesque

L’Art du jeu, Chad HARBACH

Un premier roman ambitieux et réussi ; parce que la vie est un sport !

Henry Skrimshander intègre le très respectable Westish College grâce à ses incroyables performances au baseball. Malgré son corps si frêle et si fragile en apparence, il attrape les balles avec une grâce et un naturel qui pourraient faire de lui une star des terrains. C’est du moins ce que pense Mike Schwartz, le capitaine de l’équipe de Westish. En faisant d’Henry son protégé, il tente d’oublier le vide dans lequel il risque de tomber une fois ses études achevées. Sur le campus, Henry partage une chambre avec Owen Dunne, élève brillant et homo assumé, qui rejoint l’équipe de baseball. Ces trois jeunes hommes vont croiser le chemin de Guert Affenlight, le président de l’université, qui voit subitement sa fille Pella revenir vivre à ses côtés pour se remettre de l’échec de son mariage. Comme dans un match de baseball, tous les joueurs sont en place : la partie peut commencer.
Pour peu que vous jetiez un œil de temps en temps dans la presse littéraire, vous serez certainement tombés sur cet Art du jeu, roman initiatique et choral, qui risque fort d’être LE roman à succès de l’été. Et pour cause : cette petite brique se dévore avec un plaisir immense et parvient à amuser et émouvoir sans jouer la facilité. C’est même parfois assez ambitieux de vouloir traiter à la fois de cette période de la fin de l’adolescence et de l’entrée dans l’âge adulte tout en proposant une vision plus large des rapports sociaux, amoureux et générationnels. Pris à un tournant de son existence, chaque personnage se voit obligé d’affronter un nouveau défi et tente de donner la meilleure trajectoire possible à sa vie, comme le lanceur le fait de sa balle. Même si parfois la peur d'échouer ou un coup de vent inattendu peuvent faire arriver la balle là où on ne l'attendait pas.
L’Art du jeu s’avance aussi souvent sur le terrain de la littérature, à travers notamment la présence de Melville, écrivain-mascotte de l’université de Westish. Et Harbach, à l’image de ses personnages souvent à la recherche de modèles, tente de se situer dans l’histoire de la littérature américaine (et plus particulièrement dans celle du roman au long cours) et de définir ce qu'est un héros d'aujourd'hui. J’ai souvent pensé à Jonathan Franzen, dans cette manière très adroite de dérouler un récit ample et sinueux sans jamais se perdre et de plonger au cœur d’un personnage et de ses espoirs déçus.
Le rythme du roman est particulièrement enlevé, avec un sens du découpage et du dialogue qui rappelle beaucoup celui du film ou des séries télévisées. Pas étonnant d’ailleurs que le livre soit déjà en cours d’adaptation chez HBO (plus étonnant par contre de découvrir, comme le laisse entendre la quatrième de couverture, que la possibilité d’une adaptation d’un roman en série soit devenu un argument de vente !).
Bien plus qu’un roman sur le baseball, L’Art du jeu se dévore et se savoure à différents degrés et il serait dommage de passer à côté en pensant qu’il ne parle que d’un sport qui nous est assez étranger.
Nous reviendrons tout prochainement sur nos propositions de lectures pour les vacances mais il est certain que celle-ci figurera en haut de la liste (le format n’est pas pratique, certes, mais ça vous fera des muscles).

Un autre avis sur le blog D’une berge à l’autre.

Référence :
L’Art du jeu, Chad HARBACH, traduit de l’anglais (États-Unis) par Dominique Defert, JC Lattès, 2012.

12 commentaires:

  1. Eh bien, ça, c'est de l'enthousiasme !
    Après un tel billet, impossible de ne pas aller au moins en lire les premières pages (et plus, si affinités !).

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    1. Et les premières pages sont efficaces: je suis entré dans le roman en un instant.

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  2. J'ai lu des avis assez partagés dans la presse anglophone, certaines dithyrambiques, d'autres franchement plus mitigées. J'hésitais donc à me lancer mais c'est sûr que ça va être dur d'y échapper dans les prochains mois.

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    1. J'avais lu un seul article, dans les Inrocks, et ils faisaient plutôt partie des enthousiastes. Maintenant, pas certain que cela soit le chef d'œuvre que certains annoncent. Je trouve même que la fin va un poil trop loin mais il est toujours difficile de finir un gros roman.

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  3. Oui, on en parle, sur certains blogs déjà. Je laisse ma bibli faire le job!

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    1. J'ai trouvé peu d'avis sur les blogs. Je pense que je n'ai pas bien cherché.

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  4. Un excellent 1er roman, dense et très structuré. Merci pour le lien. Je rajoute de suite le tien dans mon billet^^

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  5. je n'ai pas fait de billet mais je suis d'accord avec toi à 400%. Oui un très très bon roman à lire !

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  6. Je suis convaincue et je vais le lire, le plus vite possible!

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